L'ALLUMEUR DE RÉVERBERES
Réflexions pour mieux se positionner face aux défis du quotidien
Des feuillets proposés par 
Christophe Élie

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 Feuillet 17

Le probleme n'est pas le probleme
Pour mieux attraper le cadeau

Le microbe n'est rien,
le terrain est tout

Attribué a Pasteur


Vous arrive-t-il de vous croire en danger devant des événements qui vous font mal ? Le feuillet 15 nous proposait un sens, qui pourrait aider a nous rassurer : tout événement ferait partie des moyens que la vie prend pour nous guider, malgré leur apparence quelquefois destructrice. Supposons que ce soit vrai. Mais ça reste qu'ils nous font mal. Comment y faire face au mieux ?... J'aimerais partir de la, et essayer d'éclairer un peu plus la question. Les familiers du site reconnaîtront des éléments qui me sont chers, mais peut-etre qu'un paysage d'ensemble en ressortira avec plus d'évidence. 


Le sens que je donne...

La pensée orientale fait la différence entre la douleur et la souffrance : on ne pourrait pas éviter la douleur, mais on peut la rendre moins souffrante, car la souffrance serait le sens que nous donnons a cette douleur. Je me dis que la question devient, en fait : comment arriver, au fil des problemes a régler, a me forger un état d'esprit tel que la douleur soit moins souffrante, tout de suite. Et en plus, qu'a la longue je me retrouve moins souvent dans le meme genre de pétrin ?

J'ai le sentiment ici d'avancer sur la pointe des pieds, tellement arriver a maîtriser cette zone de notre expérience m'apparaît l'oeuvre de toute une vie... Pour aujourd'hui, j'ai cette quand meme conviction a vous partager : je crois que si nos problemes nous blessent et s'incrustent, c'est parce que nous nous défendons d'eux, tout en restant le nez rivé dessus. Quand nous commençons a perdre moins de temps a cette adresse-la, que nous déplaçons notre attention a ce que les problemes veulent nous dire, nous commençons a changer notre terrain, pour reprendre le mot de Pasteur, et alors nous commençons a pouvoir  changer notre avenir comme disait Walsch. Voyons ça de plus pres, a travers deux cas concrets :


Un deuil est aussi un clin d'oeil

Le premier cas m'est fourni par le paysage d'un campus universitaire : avez-vous observé les étudiants étrangers a leur premier hiver au Québec ? Vous les voyez courir en espadrilles entre la résidence et l'autobus, cachés derriere leur foulard deux fois enroulé autour du cou. Ils sont a mille milles de soupçonner qu'on puisse prendre plaisir a une saison pareille, que courir dans la tempete puisse etre quelque chose d'enivrant.

La deuxieme situation est celle d'une amie, Flora. Elle vivait un fort probleme de couple : conflit teinté de violence, départ de son fils aîné excédé par la situation familiale... C'était tantôt la révolte, tantôt l'anxiété, et de plus en plus la fatigue chronique. Ce qui me frappait chez elle, c'est qu'a peine lui avait-on parlé d'autre chose, qu'elle trouvait le tour de ramener la conversation a son conflit. Je ne suis pas sur qu'elle entendait encore les oiseaux chanter le matin quand elle partait travailler, ou qu'elle apercevait un écureuil en train de grimper dans un arbre. Toute son attention était sur sa tension.

Vous voyez ce que ces deux situation ont de commun : un qui se défend du froid, et n'aperçoit pas ce qu'il pourrait savourer de l'hiver; l'autre qui tourne en rond dans ses émotions et ne voit plus les petits bonheurs a sa portée. Les deux encaissent les coups au plus pressé, toute l'énergie passe a se défendre. Pendant ce temps, le ressenti, l'instinct de plaisir sont au point mort. On est victime.

Ceci nous ressemble un peu, quelquefois, vous ne trouvez pas ? Combien de fois faisons-nous face aux problemes en ruminant le sentiment d'etre traités injustement, d'abord par notre entourage, puis peu a peu par la vie tout court. Et nous activons a neutraliser les problemes a mesure qu'ils nous tombent dessus, jusqu'a en sortir épuisés. Pas si différent, quand on y pense, du boxeur trop accaparé par les coups a esquiver pour etre capable de développer sa propre stratégie.

C'est la que notre vision des choses entre en jeu et que le fait de revoir une croyance peut faire toute la différence. La croyance a mettre en place, ici, c'est celle qu'un probleme est plus qu'un probleme, qu'il est en meme temps un panneau de signalisation. Et meme davantage : qu'il est  une occasion favorable , pour reprendre l'expression de Joe Vitale, vulgarisateur de la méthode hawaienne Ho'oponopono. Dans le livre Zéro limite, il explique ce phénomene de façon saisissante :  Les problemes représentent des mémoires du passé que nous visionnons de nouveau afin de nous offrir une autre occasion  de voir cette situation avec les yeux de l'amour et d'agir ensuite par inspiration [plutôt qu'avec un réflexe de victime]. ** 

Qu'il s'agisse d'un déces ou d'un choc émotionnel, d'une maladie ou d'un échec, j'ai pu vérifier a quel point un deuil n'était plus juste un deuil a partir du moment ou je me mettais a le regarder comme un clin d'oeil. C'est la vie qui me serre le bras dans un coin, pour me dire : Hé, réveille ! depuis combien de temps as-tu cessé d'activer une soif, un désir, de créer un projet qui te ferait vivre et pas seulement de survivre ?... Et dans d'autres contextes : Regarde, somnambule ! il y a quelque chose d'important ici que tu n'as pas décodé encore, cherche donc un peu... 

 


Ce a quoi je résiste persiste

La pratique des arts martiaux fournit un exemple qu'on peut transposer au plan émotif. Je me rappelle quand je faisais du judo : un coup nous était porté, tout de suite il s'agissait de désamorcer intérieurement notre réflexe de peur, afin d'arriver a nous concentrer sur les forces en présence, sur le sens du mouvement. Puis c'est comme si on avait dit a l'adversaire Tu veux aller par la ? Allons-y !... . On se servait alors de sa force pour l'entraîner plus loin, hors de nous, par une bascule des hanches qui rendait le mouvement sans douleur, et meme gracieux!

Se servir de la force qui nous menace, la canaliser. Hum... beau programme, vous allez me dire. Est-ce qu'il n'y a pas a ressentir sa révolte d'abord, et la gueuler ? Que ça soulage ! Est-ce qu'on ne doit pas éprouver ce qui nous blesse, a l'état brut, sans se précipiter a réagir, tantôt en fuyant dans sa tete pour l'expliquer, tantôt en voulant se changer tout de suite, parce que la culpabilité monte ? Que faites-vous de l'envie de pleurer un bon coup ? Ça fait tellement de bien ! ...

Tout a fait ! Et c'est le premier pas a faire, contacter ce qui fait mal. Apres, se ramener avec tendresse du fossé au chemin. Je dis juste que le fait de savoir par avance − et de se rappeler a ce moment-la − qu'on n'est pas en danger, et que la déroute cache une route, toujours, ça devient un levier puissant pour se sortir du fossé. Ce que je souhaite partager ici, c'est ma découverte et celle de tant d'autres, que la douleur perd du terrain non pas parce qu'on s'est évertué a la mater, mais parce qu'on a choisi de redonner sa chance a la vie. On a repris le volant et choisi d'en faire l'occasion d'autre chose. Vous connaissez la phrase évangélique Ne cherchez pas le vivant parmi les morts ? L'expression du début, le probleme n'est pas le probleme , me paraît dire exactement la meme chose : le vrai probleme, c'est chaque fois qu'on perd l'occasion de se remettre dans une attitude créatrice. La difficulté rencontrée aurait pu etre un tremplin, on s'est simplement barré les pieds dedans. Dommage.  Meilleure chance la prochaine fois...


Rever son futur

Qu'est-ce qui se passe quand on arrive a cette attitude ? Au lieu d'etre en combat, tout épuisé a se défendre d'une attaque, la meme énergie est déplacée sur des soifs a combler. On passe de la roche a la terre, je dirais, la ou la vie peut a nouveau germer... La mort par elle-meme ne fait pas de bourgeons. Ce qui n'empeche pas que c'est plein de vie dedans , disait Félix Leclerc. Tiens, a ce propos, je me rappelle un organisme de relevement social, au Pérou, qui avait opté pour cette attitude d'une maniere radicale : au lieu de discuter avec les gens de leurs problemes, les animateurs commençaient avec eux par un rituel : ils faisaient rever les gens sur leur futur. Sans doute pour qu'ils aillent puiser la l'énergie nécessaire a faire face a leurs défis actuels. Ou pour qu'ils arrivent a nommer des zones sur lesquelles ils avaient déja le pouvoir de changer quelque chose.

Revenons a ceux qui m'ont aidé a comprendre tout ça. A propos d'étudiants étrangers, j'ai vécu une expérience passionnante avec un groupe de jeunes Asiatiques : une glissade en soucoupes volantes dont ils vont se souvenir longtemps. Émerveillés de se rouler dans la neige comme le fait un enfant, et meme d'en avoir chaud !, ils ne voulaient plus quitter le site et songeaient meme a retarder leur départ en région afin de pouvoir revenir glisser le lendemain. Je suis sur qu'ils ne pourront plus jamais voir l'hiver avec les memes yeux.

Et j'ai revu Flora. Elle m'a partagé les décisions auxquelles elle est arrivée : elle a repris contact avec deux amies, elle qui depuis un bout de temps s'isolait. Elle s'est abonnée a un programme de cinéma du mardi, pour se faire une soirée pas comme les autres . Et elle s'est prise une adresse électronique pour elle seule, se préservant un espace d'intimité dans le courriel familial. Avec la lueur nouvelle que j'ai aperçue dans ses yeux, je crois qu'elle a pris le virage.


Christophe Élie

 

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Édité par le site GRANDIR, QUÉBEC
http://www.sitegrandir.com

N'hésitez pas a reproduire nos textes, en indiquant la source.
 v2010-12-27

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